Pouvez-vous nous raconter l’histoire du
CyberBuss ?
Le Cyberbuss est né dans un moment de magie. Nous étions cinq
amis très proches, tous pleins d’énergie, et nous recherchions de
nouvelles directions pour nos vies. Je sentais pour ma part que nous
avions besoin d’un nouveau projet constructif, d’une mission. Nous
étions une vraie bande de globetrotters, nous profitions tous
pleinement de la vie et notre seul problème était d’être bloqués par
des emplois qui nous laissaient peu de temps pour voyager.
Il nous fallait un bus pour partir. Un cyber buss. A cette
époque, en 1996, l’Internet était encore frais et excitant. Tout
semblait y être possible. Je travaillais comme web designer et
j’étais déjà à la recherche de projets à but non lucratif dans
lesquels m’investir. Un des membres de notre groupe travaillait dans
les systèmes de téléphonie par satellite, c’est lui m’a ouvert les
yeux sur la possibilité de se connecter à Internet depuis n’importe
quel point de la planète.
Tous les ingrédients nécessaires étaient réunis. Si vous pouviez
travailler de chez vous, pourquoi ne pas le faire depuis le Grand
Canyon du Colorado. Notre but était de créer une unité mobile
capable de transporter un environnement de travail jusqu’où nous
aurions envie d’aller – de manière à emmener notre emploi avec nous
dans nos voyages, plutôt que travailler par à coups et à chaque fois
revenir complètement fauchés de voyage pour se refaire une santé
financière avant de repartir. Bref, l’idée a fait son chemin…
Une personne s’est proposée pour repeindre le bus, une autre pour
prendre des photos et conserver ainsi des traces de nos expériences,
une autre pour cuisiner, etc. Nous avions cette vision d’une
compagnie mobile de guerriers de la route et du code informatique.
Un mois plus tard, nous avions acheté un ancien bus scolaire,
l’avons repeint en argenté et rien n’a plus jamais été pareil.
Pouvez-vous nous présenter les membres de
votre tribu ?
Nous sommes bien trop nombreux pour que je puisse citer tout le
monde. En voici quelques-uns. J’ai fait de mon mieux pour constituer
une liste qui réunisse des personnes d’un peu tous les horizons
:
***Les pères fondateurs du CYBERBUSS :
Qui est jim merry
(jim@merryhaus.net), l'homme mystère...
Anton da nomad (anomad24@hotmail.com) Guide à vélo en France
durant l'été. Notre photographe préféré.
Yanick the volume king (volume.king@cyberbuss.com) - Il est
pour deux ans en France, à Antibes. Notre cerveau.
***Les personnages importants de la région de San Francisco
:
Sgt. Sauce csgoerz@hotmail.com Notre chargé des
relations publiques - en première ligne. Celui qui peut encore
communiquer avec les enquêteurs.
Roby Wan robywangrip@yahoo.com Sculpteur de déchets,
sampleur electronica, batteur et performer.
Sir Loin hobomike@cyberbuss.com Décideur, MC - générateur
d'énergie.
Joanne (Australian) joannekeune@hotmail.com Coordinateur,
la voix de la raison.
Digital Dan digital.dan@cyberbuss.com Mentor numérique,
musicien et spécialiste de la vidéo.
***Les fhREaKs Virtuels:
Kwas (New
Jersey) kwas77@idt.net Voyageur virtuel - avec nous par
l'esprit.
Gametone (new York) gametone@yahoo.com Un autre
collaborateur transcontinental.
Spackle (northern California - nous ne l'avons jamais
rencontré. resonantchaos@thegrid.net
yoshi (japan) kaneda@m9.people.or.jp Journaliste
japonais.
D'où vous est venue cette envie de partir sur
la route ?
De l’angoisse de vivre entre quatre murs durant la majeure partie
de l’année. De la tristesse de savoir qu’il y a tellement d’endroits
géniaux à explorer et de ne pas avoir le temps ou l’argent pour y
aller.
Qu'est-ce qui fait la spécificité de la tribu
du Cyberbuss par rapport aux autres bandes de freaks qui parcourent
le monde en faisant la fête ?
Pour commencer, nous ne cherchons pas à gagner d’argent. Nous en
perdrions plutôt – dommage que le Fisc américain n’ait pour seules
catégories que celles des organisations à but lucratif et
non-lucratif. Nous ne sommes pas non plus des artistes
professionnels capables de proposer des représentations
chorégraphiées ou préparées à l’avance. Tout ce que nous faisons est
spontané et un peu expérimental. Nous créons une atmosphère,
réunissons les ingrédients nécessaires et faisons prendre la sauce.
Des trucs se passent, les gens déjantent.
Nous constituons une petite unité mobile indépendante. Nous
n’avons pas besoin d’assister à des spectacles ou de participer à
des festivals pour nous divertir comme à l’époque révolue de la
musique rock.
Nous préférons créer notre propre réalité à chaque fois que
l’occasion se présente et faire notre propre truc. Qu’il s’agisse
d’enregistrer de la musique, de construire d’immenses sculptures
composées de déchets, d’infiltrer des fêtes, d’organiser des bals
costumés, de diffuser du contenu audiovisuel en direct sur le web ou
de monter un stand de limonade.
Comment vivent les membres de votre tribu
?
Un grand nombre d’entre nous possèdent des emplois normaux, comme
tout le monde – la plupart dans le domaine des nouvelles
technologies. Nous faisons ça pour le plaisir. C’est un échappatoire
au monde ultra commercialisé dans lequel nous vivons. Les gens s'en
étonnent et nous demandent tout le temps si nous avons quelque chose
à vendre ou si nous sommes payés pour faire ça.
Certains, c’est mon cas, font plein de petits boulots. Il peut
s’agir de missions en rapport le web ou de décharger des camions. Je
préfère largement naviguer de projets en projets et rester maître de
mon emploi du temps. Nous avons ainsi parmi nous une fille qui écrit
des horoscopes pour un site web. Elle se met à l’écart une ou deux
heures par jour pour préparer et écrire son horoscope avant de se
connecter du bus pour l’envoyer au site.
Nous voulons pas devenir riches ou célèbres, nous voulons juste
nous amuser. Nous amuser plus que tout ce que nous aurions pu
imaginer. Nous vivons autant que possible sur les restes de la
société. Nous adorons nous servir des déchets pour nos créations.
C’est particulièrement le cas pour le CyBeRbUsS cOSTuMe BaLL.
Le temps compte plus pour nous que l’argent. Nous travaillons
moins et nous avons plus de temps libre. Nous vivons très
simplement. Nos voitures sont de vraies épaves, nos vêtements sont
fatigués, nous buvons des alcools de mauvaises qualité et nous nous
nourrissons en grande partie de pizzas et de burritos.
Est-il vrai que certains d'entre vous
travaillent depuis le bus et vivent en permanence sur la route ?
Oui, certains d’entre nous travaillent par périodes depuis le
bus, mais ceux qui vivent en permanence sur la route sont plutôt
rares. Je passe entre deux et trois mois par an dans le bus. Ca me
suffit.
Avez-vous l’impression que le télétravail
rentre dans les moeurs en Amérique du Nord ?
Oui. Ca me semble logique. Particulièrement dans le coin puisque
de nombreux emplois nécessitent l’utilisation d’ordinateurs et de
lignes téléphoniques.
Pensez-vous que cette pratique va se
généraliser dans le futur ?
Oui, c’est inévitable. Ca rentre clairement dans les mœurs. Quand
les gens relèvent mon numéro de téléphone professionnel sur mon site
web et m’appellent, ils ne font que contacter une société. Comment
pourraient-ils savoir que je me trouve à ce moment-là dans un garage
ou dans un ancien bus d’école ?
Parlez-nous des ordinateurs embarqués et du
matériel de télécommunication du Cyberbuss. Quel type de connexion
utilisez-vous ?
Nous essayons de rester aussi simple que possible. Nous
empruntons et partageons tout le temps notre équipement :
-
Un ou deux portables. - Un téléphone cellulaire ou un modem sans
fil (dans les zones urbaines). - Une ligne de téléphone. -
Deux caméras digitales. - Parfois une webcam.
Jusque là, ça reste plutôt simple. La partie la plus sophistiquée
se situe au niveau de notre chargeur de batterie. Les batteries se
rechargent sur l’alternateur, les panneaux solaires ou, si
nécessaire, sur une source d’électricité traditionnelle.
Nous avons également à bord :
- un émetteur radio pour
diffuser notre propre station de radio. - un système GPS. -
Une CB. - Un sound-system pour la musique électronique ou des
groupes au grand complet. - Un rasoir électrique pour nos
expériences de sculptures capillaires. - Une batterie de cuisine
complète.
Est-ce financièrement et techniquement
accessible à tout le monde ?
Pour ce qui est des moyens financiers, lorsque vous possédez un
ordinateur portable et une source d’électricité renouvelable, le
reste est gratuit à l’exception du temps de connexion (environ un
dollar par minute pour une connexion à faible débit) et des services
sur Internet. Si vous avez de l’espace sur un serveur et une
connexion, rien de vos empêche de prendre autant de photographies
que vous le voulez et de les mettre en ligne. On peut bien sur
éviter de dépenser trop d’argent en temps de connexion par satellite
(juste de quoi consulter vos emails et mettre à jour les sites).
Tout ça ne coûte quasiment rien.
Nous ne possédons pas de téléphone par satellite mais un de nos
amis en vend et nous en prête un en démonstration depuis quatre ans
(sinon vous pouvez toujours en louer un). Mais c’est bien tout ce
dont vous aurez besoin lorsque vous vous trouverez à des kilomètres
de la première ligne téléphonique. Et c’est souvent moins cher que
la location d’un bureau ou d’un local commercial. L’essence reste
notre première dépense.
Jusqu'où vous emmènent vos pérégrinations ?
Etes-vous déjà sortis du continent nord-américain avec le Cyberbuss
?
Nous sommes montés et descendus le long de la côte ouest de
l’Oregon jusqu’à la pointe du Baja Mexico. Il y a tellement de
choses à voir sur cette côte. Nous prévoyons pour l’année prochaine
une grande tournée dans le Nord-Ouest, dans la région de Seattle, à
l’occasion de l'Art Car Fest. Nous irons jusqu’au Canada et dans le
Montana.
Nous traverserons un jour les Etats-Unis mais il y a tellement
d’endroits à explorer par ici. La côte ouest est vraiment un bon
endroit pour se balader.
Etes-vous en contact avec d'autres tribus de
nomades technoïdes - que ce soit en Amérique ou dans le reste du
monde ? Je pense notamment aux Mutoïd Waste Company dont j'ai
d'ailleurs perdu la trace depuis un moment (à ce propos, tous les
lecteurs de la Spirale qui auraient des informations sur eux sont
chaleureusement invités à me contacter).
J’ai récemment découvert la Mutoïd Waste Company, mais nous ne
sommes pas en contact avec eux. Ils ont cependant l’air très
intéressants. Sinon nous avons de nombreux amis originaires des
quatre coins du monde qui sont venus voyager avec nous dans le
bus.
Nous sommes aussi en contact avec des centaines d’amis virtuels à
travers le monde. Ils nous découvrent généralement sur le réseau, à
travers notre site web. Nous avons même fait virtuellement la fête
avec bon nombre d’entre eux à l’occasion des Wrybread Honey Pot Web
Cast Sessions (vous pouvez consulter les archives de ces évènements
à l’adresse http://www.wrybread.com/cam). Nous diffusons tous
les jeudis une émission en direct durant laquelle vous pouvez nous
entendre en streaming Mp3, nous voir grâce à notre webcam et
discuter avec nous par claviers interposés. Certains de nos
auditeurs ont aussi leurs propres webcams, ce qui nous permet de les
voir et de communiquer avec eux. Ils nous regardent en train de
délirer et nous les regardons faire pareil. C’est un peu comme si
nous faisions la fête dans le CYBERESPACE.
J'ai vu sur votre site que vous participez à
chaque édition du Burning Man Festival. Quels sont les autres grands
rendez-vous de freaks à ne pas rater dans le monde ? Où pourra-t-on
vous rencontrer dans les mois à venir ?
Nos grands rassemblements annuels sont le Burning Man Festival,
le CyberBuss Costume Ball et les Art Car Fests.
Mais nous avons aussi participé à de très nombreuses parades, à
de nombreux festivals ainsi qu’à beaucoup d’événements artistiques
dans la région de San Francisco.
Le reste du temps nous partons explorer de nouveaux endroits
désertiques. Nous campons dans le désert, nous partons à la
recherche de sources d’eau chaude, de lacs, de rivières. Nous nous
promenons dans la montagne ou sur la côte. Un grand nombre d’entre
nous restent d’éternels campeurs.
Nous avons aussi participés au carnaval de Bahia au Brésil et,
vous ne me croirez peut-être pas, mais le carnaval de Luzerne en
Suisse nous a beaucoup impressionnés.
Comment fait-on pour rejoindre votre tribu
?
Il n’existe pas de carte de membre. Nous ne sommes qu’une bande
de fhREaKs. Les gens que ça intéresse finissent toujours par
découvrir notre existence et par monter dans le bus. La meilleure
manière de se tenir au courant reste toutefois de s’abonner à notre
mailing-list. Nous l’utilisons pour faire circuler l’information et
envoyer de temps à autres quelques trucs bizarres.
Racontez-nous votre plus belle expérience sur
la route...
Mon dieu. Il y en a tellement. Mais si je ne devais en citer
qu’une, je dois reconnaître qu’il n’y a jamais rien eu de comparable
à notre premier voyage en 1997 dans la Vallée de la Mort. La
première expérience reste toujours la plus riche – ce fut également
vrai dans le cas du Burning Man Festival.
Nous étions quatorze, répartis sur deux bus différents. Nous
avons vraiment eu l’impression de quitter la civilisation à bord de
deux vaisseaux spatiaux. Nous avions tous des looks cyber et nous
communiquions d'un bus à l’autre avec une CB. Nous avons même reçu
une demande en mariage à travers la CB. Nous nous attaquions
mutuellement à grands coups de fruits et de pistolets à eau. Nous
avions tout organisé de façon à ce qu’un bus s’occupe de préparer
les déjeuners et les dîners pendant que l’autre se chargeait du
ravitaillement.
Nous avons passé la nuit de Thanksgiving à festoyer sous le ciel
du désert avec des lunettes de ski, à la lumière d’un feu de camp et
au son des tambours. Nous escaladions les dunes de sable et
construisions des planches de surf des sables avec des panneaux de
bois. Tout était parfait. Nous étions pour la première fois de notre
vie entièrement indépendants, hors des limites de la société. Et
tout ça vraiment au milieu de nulle part.
Sur le chemin du retour, quelqu’un a lancé en plaisantant que
nous devrions aller au Mexique plutôt que de rentrer à la maison.
Nous avons décidé de mettre cette décision au vote. Si cette volonté
était unanime, nous irions. Nous avons eu treize oui et un seul non.
Nous avons bien failli ne jamais refaire surface dans le monde réel.
Nous avons été deux fois dans la Vallée de la Mort et à la pointe du
Baja Mexico, mais nous n’avons jamais connu d’expérience aussi
parfaite. Détail amusant, je n’ai retrouvé mon appareil photo que
j'avais perdu qu’à notre retour et nous n’avons donc quasiment pas
gardé de traces de ce voyage. Ca restera un peu comme un rêve.
Ne ratez pas CyberBuss.com où
vous retrouverez la tribu de fhREaKs du CyberBuss…
Sans oublier le site du Burning Man
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